Premier bilan des analyses toxicologiques effectuées dans le contexte du Drug Checking à Genève

Objectif Depuis de nombreuses annees, la politique en matiere de drogues est basee en Suisse sur quatre piliers, a savoir la prevention, la therapie, la repression et la reduction des risques. Parmi les actions mises en œuvre concernant la reduction des risques lies aux consommations recreatives de substances psychoactives, une nouvelle offre a ete proposee depuis 2019 a Geneve, consistant en l’analyse sur base anonyme et gratuite pour l’usager, d’echantillons destines a etre consommes par celui qui demande l’analyse. L’objectif de ce travail est d’obtenir une vue synthetique des resultats des echantillons soumis a analyse apres 9 mois d’activite. Methode Les echantillons (poudre, comprime, gelule, papier buvard, liquide) sont recueillis lors d’un entretien avec des specialistes de la prevention et de l’accompagnement. Ils sont ensuite transmis au laboratoire de maniere anonyme. Selon le type d’echantillon une solution methanolique est preparee a 1 mg/ml. Systematiquement, cette solution est analysee par chromatographie gazeuse couplee a la spectrometrie de masse apres injection directe, ainsi qu’apres evaporation et acetylation. L’identification des spectres de masse est realisee par comparaison des resultats avec les donnees contenues dans des bibliotheques de references. La solution est egalement systematiquement analysee par chromatographie liquide couplee a la spectrometrie de masse en tandem, afin de determiner la concentration de cocaine, d’amphetamine, de methamphetamine, de MDEA, de MDMA, de 4-MEC, de MDPV, de mephedrone, de methylone, de DOB, de 2C-B, d’heroine, de LSD et de ketamine. Une analyse complementaire de la solution methanolique peut etre effectuee par chromatographie liquide couplee a la spectrometrie de masse en haute resolution, pour confirmer l’identification des substances par comparaison des resultats avec des donnees contenues dans une bibliotheque de reference. Resultats Au total, 115 echantillons ont ete analyses (78 poudres, 20 comprimes, 9 papiers buvard, 7 liquides et 1 gelule). Dans 97 echantillons la substance annoncee a ete detectee ; alors que pour 8 echantillons, aucune substance (absence de pic significatif) n’a ete mise en evidence, et pour 10 autres echantillons, le resultat des analyses ne correspondait pas qualitativement au produit annonce. Les substances les plus frequemment mises en evidence sont la cocaine (n = 44), la MDMA (n = 24), le LSD (n = 9), et la ketamine (n = 6). Les autres substances mises en evidence sont la psilocine, la metocine, le 4-ACO-DMT, l’amphetamine, la methamphetamine, la MDA, le 6-APB, le 2C-B, le 2C-E, le 2-Br-4,5-DMPEA, le DMT, le DOB, le DOC, le DOM, la methoxetamine, la clepherone, le CBD, le GHB, le stanozolol, la methadone, le dextromethorphane, l’heroine, la codeine, et l’ethanol. Le taux de purete median de la cocaine est de 69 % ; les substances de coupage mises en evidence sont le levamisole, la phenacetine, la cafeine, la lidocaine le paracetamol et l’ephedrine. Pour la MDMA, le taux de purete median des poudres (n = 10) est de 91 %, et la dose mediane par comprime de MDMA est de 194 mg. Conclusion Les analyses et le dispositif mis en place ont permis d’emettre plusieurs alertes (publiees sur nuit-blanche.ch) concernant soit la qualite des produits, soit une dose elevee de substance, aupres des usagers recreatifs de substances psychoactives. Ces resultats montrent ainsi l’interet de cette approche dans une vision de reduction des risques envers des consommateurs absents des autres dispositifs. En outre, les resultats permettent d’obtenir des informations concernant la dynamique du marche local des produits psychotropes a usages recreatifs, de maniere complementaire aux analyses des seringues usagees, des eaux usees, des saisies de police et des douanes, ainsi que des echantillons biologiques forensiques et cliniques.