La grande étrangère ou la voisine d’à côté? Foucault et la tradition littéraire française

2014 
Dans les pages consacrees a Don Quichotte dans Les mots et les choses, Michel Foucault propose une comparaison, d’ailleurs tres celebre, entre le fou et le poete. Il s’ensuit une definition de la poesie en tant que « parente enfouie des choses » et « ecoute de ‘l’autre langage’ ». Toutefois, aux yeux d’un specialiste, cette modernite poetique a peu a faire avec Cervantes et le XVIIe siecle ; elle correspond au profil d’un poete francais, et bien plus « moderne », comme Baudelaire. Plutot que de s’attarder sur cet anachronisme, ce qui serait peu fructueux sur le plan critique, cette communication envisage d’eclairer les sources de la pensee foucaldienne. En effet, chez Foucault, l’idee de « litterature » semble directement puisee de la reflexion interne a la theorie litteraire francaise : des concepts tels ceux d’« alterite », d’« opacite » et d’« affirmation de soi » relevent de toute evidence des lectures donnees par Bataille et Blanchot a la ligne poetique Nerval/Baudelaire/Rimbaud/Mallarme. Cette litterature, orphique et essentielle, est pour Foucault la categorie d’interpretation d’une litterature contemporaine, celle representee par Conrad, Char, Celan et Bernhard : une litterature qui s’exprime sur un plan solitaire, heroique, agonistique, portant sur la scene le conflit sujet-Monde (et discours-Monde). C’est pourquoi il semble difficile de transferer les conclusions de Foucault (par exemple la definition de « l’espace litteraire » comme « la part du feu ») hors du contexte culturel francais. Et pourtant, grâce a la mediation foucaldienne, cette litterature voisine peut devenir la grande etrangere d’une autre litterature, celle de l’experience ethique et relative (Williams, Kis, Larkin, Bolano et Sebald).
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