Formes cliniques de l’infection à Francisella tularensis : à propos de trois observations

2019 
Introduction La tularemie est une maladie d’inoculation causee par un coccobacille gram negatif, Francisella tularensis. Cette zoonose est transmise a l’homme par contact avec des animaux infectes du genre des lagomorphes ou des rongeurs, et plus rarement par piqure de tiques. La forme ulcero-ganglionnaire est la plus decrite en pathologie humaine. Nous rapportons le cas de deux patients se presentant pour une symptomatologie similaire inaugurant le tableau d’une tularemie pulmonaire dans les suites d’un debroussaillage dans la region de Bourgogne-Franche-Comte, et un 3e cas d’une tularemie dans sa forme ganglionnaire suite a une piqure de tique, survenant tous au 2e semestre de l’annee 2019. Observation Observations 1 et 2 : deux patients, M. O., et son beau-frere ayant respectivement 64 et 68 ans, sans antecedents particuliers, se sont presentes aux urgences dans un tableau fait d’une fievre oscillante entre 38,5 et 40 °C avec frissons, une toux peu productive et des myalgies diffuses. Une semaine auparavant, ils etaient partis ensemble debroussailler des terrains sans aucune protection du visage ou port de casque (les patients rapportaient avoir vu des rongeurs heurtes par leur debroussailleuse rotative, avec projection de sang). L’examen somatique des deux patients etait normal en dehors d’une fievre objectivee. A la biologie, on retrouvait une lymphopenie avec discrete monocytose. Il existait un syndrome inflammatoire biologique avec une CRP a 98 mg/L pour l’un et 120 mg/L pour l’autre. Les radios pulmonaires ne montraient pas d’anomalies. Les ECBU etaient steriles. Les hemocultures etaient negatives. Les serologies EBV, CMV et toxoplasmose concluaient a une immunite ancienne. Les serologies des hepatites B, C et VIH etaient negatives. Une tomodensitometrie thoraco-abdomino-pelvienne injectee a ete realisee pour les deux patients objectivant un aspect quasiment identique fait de plusieurs formations nodulaires spiculees faisant entre 5 et 29 mm de grand axe predominant au niveau des lobes inferieurs, avec absence d’epanchement pleuro-pericardique. Un lavage broncho-alveolaire a ete realise pour l’un des patients retrouvant une hypercellularite avec predominance de polynucleaires. L’examen direct ne retrouvait pas de d’agents pathogenes, ni de bacilles acido-alcoolo-resistants ou de cellules neoplasiques. La culture etait negative. Les antigenuries legionelle, les serologies Mycoplasme pneumoniae, Chlamydiae pneumoniae, Coxiella burnetii, ainsi que le Quantiferon-TB Gold® etaient toutes negatives. La serologie F. tularensis faite a 3 semaines du debut des symptomes est revenue positive pour les deux patients en IgM et en IgG, avec un titre d’IgG qui a double sur une serologie de controle au bout de 15 jours pour l’un des deux patients. Un 2e serum a ete envoye au CNR confirmant ainsi la positivite des serologies. Le diagnostic d’une tularemie pulmonaire a ete retenu. Aucune antibiotherapie n’a ete prescrite devant une evolution spontanement favorable. Une nouvelle imagerie de controle, avec un recul de 3 mois montrait une quasi disparition des lesions pulmonaires pour les deux patients. Observation 3 : un jeune de 32 ans, sans antecedents, s’est presente pour une fievre mal toleree avec un conglomerat d’adenopathies inguinales gauches douloureuses, fluctuantes a la palpation, non suppuratives, et un placard erythemateux cutane en regard, sans lymphangite associee. L’examen retrouvait un chancre d’inoculation noirâtre faisant 2 cm de diametre au niveau de la face posterieure de la cuisse gauche, ainsi qu’une deuxieme cicatrice au niveau des fesses. Une piqure de tique a ete rapportee par le patient 4 jours auparavant, apres une randonnee pedestre dans le Doubs. A la biologie, on notait une et une CRP elevee a 55 mg/L. L’echographie et le scanner abdomino-pelvien confirmaient la presence de multiples adenopathies inguinales gauches dont les plus volumineuses mesuraient 14 et 18 mm, remontant jusqu’en iliaque externe gauche, associees a une infiltration œdemateuse cutaneo-sous-cutanee. Les serologies syphilis et VIH etaient negatives. Les serologies Bartonella, Rickettsia et F. tularensis faites a une semaine du debut des signes etaient aussi negatives. La PCR sur biopsie du chancre, etait fortement positive a F. tularensis, confirmee au CNR. Un traitement par doxycycline a ete prescrit avec une evolution favorable faite d’une apyrexie et disparition des adenopathies. Conclusion Actuellement, une forte incidence de tularemie est decrite en France depuis 2018, mais plutot dans l’ouest du pays. La survenue de nombreux cas d’atteinte pleuropulmonaire et ne presentant pas les facteurs de risque habituels suggere une modification de l’epidemiologie, d’origine non connue a ce jour, et justifiant une surveillance stricte du reservoir de cette pathologies humaine accidentelle.
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