Purpura fébrile avec arthralgies sous rituximab : savoir évoquer une maladie sérique

2019 
Introduction La maladie serique est une reaction d’hypersensibilite retardee de type III induite par un medicament avec formation de complexes immuns circulants survenant habituellement entre 7 a 14 jours apres exposition a l’antigene. Des cas de maladie serique au rituximab, anticorps monoclonal anti-CD20 chimerique utilise notamment dans le traitement des maladies auto-immunes, ont ete rapportes depuis les annees 2000. Nous rapportons le cas d’une maladie serique au rituximab chez une patiente traitee pour une vascularite cryoglobulinemique dans un contexte de lupus erythemateux systemique et de Gougerot-Sjogren. Observation Une patiente de 37 ans aux antecedents de lupus erythemateux systemique de forme cutaneo-articulaire associe a un syndrome de Gougerot-Sjogren presente depuis plusieurs mois un tableau de purpura vasculaire des membres inferieurs. Il est mis en evidence une cryoglobulinemie de type III avec consommation du complement et le diagnostic de vascularite cryoglobulinemique est pose. Il n’y a pas de complications viscerales. Elle recoit une corticotherapie orale a dose degressive mais devant une corticodependance superieure a 10 mg/jour, un traitement par 4 cures hebdomadaires de rituximab est debute a la posologie de 375 mg/m2. La corticotherapie est maintenue a 10 mg/j. A j9 de la premiere perfusion, la patiente est hospitalisee pour un tableau febrile articulaire et cutane. Elle presente des arthralgies inflammatoires des petites et grosses articulations, des douleurs des deux articulations temporomandibulaires, une fievre jusqu’a 39 °C, un erytheme maculopapuleux prurigineux des bras et du tronc, et une recidive brutale d’un purpura vasculaire infiltre des deux membres inferieurs remontant jusqu’a la racine des cuisses. Le bilan biologique retrouve une anemie a 108 g/L normochrome normocytaire associee a une thrombopenie a 139 G/L. Il existe des perturbations du bilan hepatique avec une cholestase anicterique associee a une cytolyse (GGT 250 UI/L, PAL 220 UI/L, ASAT 152 UI/L, ALAT 135 UI/L). La CRP est a 70 mg/L. Le sediment urinaire est normal, il n’y a pas de proteinurie. La fonction renale est normale. Sur le plan immunologique, le bilan est stable avec consommation du complement (C4 a 0,04 g/L, CH 50 a 17 UI/ml), test de Farr positif > 96 UI/L et cryoglobulinemie de type III en faible quantite constituee d’IgG et d’IgA polyclonales avec facteur rhumatoide positif. Les PCR EBV, CMV et parvovirus B19 sont negatives. Les hemocultures sont steriles. Le tableau est hautement evocateur d’une maladie serique au rituximab. L’evolution a ete favorable en 72 h sans necessite de majorer la corticotherapie, avec disparition de la fievre et du syndrome inflammatoire, amelioration des arthralgies et des lesions purpuriques. Une declaration a la pharmacovigilance a ete faite. Discussion Le premier cas de maladie serique au rituximab a ete decrit en 2001 chez un patient traite pour une neuropathie peripherique [1] . Le risque relatif de survenue de maladie serique au rituximab depend la pathologie sous-jacente : il est 12 fois plus important chez les patients traites pour une maladie auto-immune comparativement a ceux traites pour une maladie hematologique [2] . Un effet protecteur des polychimiotherapies a ete avance. Le risque est maximum dans le sous-groupe des patients lupiques (risque relatif a 20). On estime la prevalence de la maladie serique au rituximab a environ 10 % dans le cadre des maladies auto-immunes. La production importante d’auto-anticorps et la reduction de la clairance des complexes immuns chez ces patients pourraient etre deux mecanismes favorisants. Aussi, l’existence d’un facteur rhumatoide positif et une hypergammaglobulinemie seraient des marqueurs de risque. Le diagnostic de maladie serique est difficile puisque le tableau clinique et biologique peut mimer une poussee de la maladie auto-immune sous-jacente [3] . Le dosage des anticorps anti-rituximab n’est pas recommande, car non disponible en pratique courante, et sans correlation stricte avec la survenue d’une maladie serique. Si la maladie serique evolue souvent favorablement en quelques jours, des cas plus severes avec defaillance d’organe(s) voire deces ont ete decris. Il n’y a pas de traitement codifie, meme si les corticoides systemiques et/ou les echanges plasmatiques peuvent etre utilises dans les cas les plus severes. La reintroduction du rituximab est deconseillee car une recidive de la maladie serique est possible, plus frequente et plus severe. Conclusion La maladie serique au rituximab, bien que rarement severe, est une complication du traitement a ne pas meconnaitre devant l’utilisation croissante de la molecule en traitement des maladies auto-immunes.
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